Tu ressembles à la mort

Alison Brady metamorphosis
tu ressembles à la mort, il m’avait hurlé ça derrière le grille pain, le toast sauté, le beurre étalé, j’avais pris son regard virulent dans les narines, déjà, mais ça n’avait pas suffit, tu ressembles à la mort. mes cheveux coupés, mon visage fardé, mes mains raides, mon tailleur chanelisé, rien de macabre à l’allure que j’avais choisie, tout se devait de l’habitude, du jour d’avant comme du prochain, le changement dans l’oeil de celui qui n’aime plus, peut-être. rien de méconnaissable pour qui pratique la fin des tunnels. tu ressembles à la mort, comme une austie lancée du haut de l’autel de l’insulte ultime, la vibration haineuse de l’intention du mal premier, une bite de satyre dans ma gorge blanche, tu ressembles à la mort, pire que ‘barraque à pipes’ ou ‘fille de pute’, ou dans le moins sexiste, tu pues la mort, ce qui aurait été comprehénsible, au réveil, mort citée mais pas comparée… Et ce lyrisme Romantique approuvé par sa langue vivace, lui, le vivant bien vivant m’accusant de faire fuir son sang rouge, de lui tourner le lait, d’avarier ses sucs.
tu ressembles à la mort, comme un couperet, une guillotine verbale sans annonce publicitaire pour avaler la salive. tu ressembles à la mort, sa vision fébrile d’un état chronique, il pensait dire plus ou a pensé moins qu’il n’a dit. bref. je n’ai pas bougé, comme un mime de la mort, justement. j’ai gardé les bras le long du corps, les jambes et les lèvres serrées comme un verrou, tu ressembles à la mort REPEAT en écho stéréo 3D, coincé dans le fond du nez, moutarde comprise. j’ai vomi dedans l’oesophage, étouffant dans la bile, virage interne des saphènes, tout s’est tordu en un coup de foudre brûlant. puis, j’ai giclé sur lui, tout un corps qui s’affale sur un autre, plaquage pompeux d’une vie avisant l’autre qu’elle ne mérite plus le podium, j’ai éclaté de haut en bas, de fond en large comme un zeppelin en feu, une lame de lave chaude, un flux de chaux… j’ai fondu sur lui, remplissant ses organes de manque à gagner. tout a disparu en dessous de moi, de ce qui restait de nous, je ne m’en souviens pas, je suis aujourd’hui au dessus de l’endroit, le lieu ne change pas, nous sommes dans le plancher, avachis comme un carton trempé, un tas d’herbe façon compost, un talus de poussières qui encombre la porte de la cuisine…
enfin, nous ressemblons à cette sorte de mort, la connue, la célèbre, celle que l’on perçoit dans les films, les champs et les rues. l’archétype, la vision moderne…
Nous ressemblons à la mort, lui et moi enfermés dans une entité vagabonde et unique, et personne ne remarque ce genre de mort, sauf ceux qui l’ont baisée jusqu’au trognon.