fragments de vœux

En 452, le concile de Chalcédoine interdit les moines gyrovagues, ceux qui errent, qui demeurent longtemps errants, qui tournent en rond, qui passent d’un monastère à l’autre, comme s’il n’y avait pas de centre à leur monde. Il leur fallait, fût-ce en des déserts, se fixer quelque part.

À Stagire qu’il veut consoler, Jean Chrysostome rappelle (ou enseigne) que l’on peut aussi fuir immobile : « Recherchons le désert, non seulement celui qui résulte des lieux, mais aussi celui qui découle du libre choix : avant toute chose, conduisons notre âme vers la terre inhabitée elle-même. »
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Alors qu’il traverse en bateau la Méditerranée (1923), l’aristocrate japonais Masanao Abe aperçoit au-dessus de l’Etna un phénomène étrange, une forme de nuages lenticulaires qui demeure un instant immobile et flotte sur le volcan avant que de disparaître; il apprend que les Siciliens nomment ce beau fantôme céleste la Comtesse des Vents. De retour sur son île, il voit la même présence planant sur le mont Fuji; il fonde l’Observatoire Abe de recherche sur les nuages et les courants atmosphériques.
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****Neema Namadamu: a Congolese activist / une activiste congolaise
« Neema Namadamu stands for a portrait outside the Maman Shujaa Media Centre in Bukavu, South Kivu, on February 25th, 2014. After her own 25-year-old daughter was attacked by members of the Congolese national army, Neema launched into action. She founded Maman Shujaa—an initiative that uses digital media to amplify the voices of women demanding peace in eastern Congo. From a media centre in the heart of Bukavu, Neema provides digital and internet literacy training to women who share their stories online with a global audience. She is also an outspoken disability activist and was the first woman with a disability to graduate from a college in Congo. »
« Neema Namadamu prend la pose pour une photo à l’extérieur du Centre médical Maman Shujaa, à Bukavu (Sud Kivu), le 25 février 2014. Après que sa propre fille de 25 ans a été attaquée par des membres de l’armée nationale congolaise, Neema est passée à l’action. Elle a fondé Maman Shujaa, une initiative qui utilise les médias numériques pour mieux faire entendre les voix des femmes qui demandent la paix dans l’est du Congo. À partir d’un centre multimédia au cœur de Bukavu, Neema offre une formation sur la culture numérique et sur Internet aux femmes qui partagent leurs histoires en ligne avec un public mondial. C’est également une militante au franc parler des droits des personnes ayant un handicap et elle a été la première femme handicapée à obtenir un diplôme d’un collège du Congo. »
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Des maladies chroniques ?
On en avait toutes à la moins une : thyroïde défaillante, diabète, hypertension, trouble mentale, Crohn ou que sais-je encore, dont on évoquait la diagnostic comme ça, en passante. C’est à peine si la terme de maladie signifiait quelque chose. On parlait d’ailleurs d’affections, comme si elle s’agissait de passions ou de traites de caractère dont la chronicité s’inscrivait dans nos quotidiennes sous forme d’obligation à se présenter régulièrement à la guichette des drogueries pour percevoir notre traitement.

On a tous dans le cœur un morceau de ferraille usée
Un vieux scooter de rêve pour faire le cirque dans le quartier
Et la petite fille chantait

Celles qui pouvaient bénéficier d’injections à effet longue durée paraissaient les plus chanceuses. Nous, les autres, devions récupérer des gélules ou des gouttes pour une à trois mois de soin à gérer soi-même.

Ketty Steward
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Le parfum qui jamais ne dort
a dit ton nom tout bas.
Tu t’es arrêté à la grille.
Le jardin était sombre et frais,
la nuit était ouverte.
L’aïeul sous son figuier
rechargeait son fusil.

Yvonne Sterk – 1973 – Beyrouth
Episode #6 des Parleuses en 2019:
https://litterature-etc.com/yvonne-sterk-1920-2012-par-milady-renoir/

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En accrochant mon manteau à une branche je veux pénétrer l’essence d’un personnage
Je t’ai demandé si les rivières profondes s’effacent lors de catastrophes et tu as su me répondre en dessinant la membrane d’un cercle nuageux
Reparlons de cinéma il aurait fallu tuer le personnage central sans faire sombrer le rôle
Je pourrais y voir une conjoncture ou la combustion lente d’une méduse
(…)
Je me souviens de mes cils très noirs et épais à six ans
Que j’imbibais d’eau oxygénée pour atténuer
La colère des fillettes à la piscine me traitant de pute qui se maquille
La logique de l’escalade
Ou peut-être la structure socio-émotionnelle de l’affrontement
Pour qu’un poème puisse respirer des dizaines d’années plus tard

Collecter des particules de soi, les tamiser en alliant puissance et finesse,
des méditations  comme munitions chez Sandra Moussempès

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image.png Malkat al-Dar Mohamed Abdullah (Arabic: ملكة الدار محمد عبد الله, Sudanese was a Sudanese literary writer, educator and women’s rights activist. Her novel written in the 1950s, « Al-Faragh al-‘arid » (The Wide Void), has been characterized as the first Sudanese novel in the style of social realism.

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in https://womensliteracysudan.blog/2021/03/25/malikah-al-dar/
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Dix ans, vingt ans plus tard, comme si la vie n’était faite que de commencements, je n’arrête pas de chercher à raconter cette histoire, sans trouver un angle adéquat. Mille petits sauts variés dans la piscine d’enfance. Et je continue à boire la tasse. Ça brûle toujours, jusqu’au tréfonds. Je me demande ce qui m’effraie à ce point, pourquoi le chemin est si tortueux. Comme si raconter allait guérir quelque chose que je ne voulais pas guérir. Il faut peut-être le reconnaître. On chérit certaines souffrances. La petite plaie rouverte sans cesse. Les ongles rongés jusqu’au sang. Les courbatures soigneusement travaillées. Les doigts qui appuient sur les touches du piano jusqu’à la douleur. Le manque. L’amour mort. Peut-être un air sans astreinte est-il irrespirable, pour certains.

Laure Limongi in  On ne peut pas tenir la mer entre ses mains

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Je peux, seule, grimper en m’auto-assurant. C’est long et technique mais c’est possible. Quand je suis sur une paroi, je peux utiliser cette corde, ces pitons et ce grigri qui bloquera ma chute et maintiendra la vitesse acceptable et le juste intervalle entre mon corps et les roches au fond du gouffre. Sur quels pitons, avec quel grigri, sur quelle corde arrimer la marche d’une vie ? Comment maintenir la bonne distance avec ce qui arrive, au moyen de quoi ? De quelles règles, de quel guidage et comment les évaluer ? Être vigilant, se placer où il faut dans les conditions optimales. Ni en danger ni hors de danger. Les nuages, la pluie, la roche, les semis, les bois, les corps, sont des guides savants. Je ne suis pas détachée par erreur, ni par lassitude, ni par aveuglement.
Je travaille à mon détachement. Je suis en pleine santé.

In Le grand jeu de Céline Minard

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