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La psychiatrisation raciale : outil du continuum colonial belge
Dimanche soir, derrière la gare de Namur, un homme noir trentenaire a été tué par la police. Les médias, Sud Info, RTBF, L’Avenir ou Le Soir, reprennent le langage officiel : « échange de tirs », « incident tragique », « suspect déséquilibré ». Dès les premières lignes, le récit est posé : le corps noir est associé à la folie, et cette folie sert de justification implicite au meurtre. Noir + « fou » = sacrifiable.
Il faut être clair : cette justification n’est ni accidentelle ni nouvelle. Elle s’inscrit dans un continuum colonial qui traverse l’histoire de la Belgique, du Congo de Léopold II aux violences policières actuelles dans les villes belges. Le corps Noir n’a jamais été considéré comme pleinement humain, jamais considéré comme digne de protection, jamais considéré comme inviolable.
Psychiatrisation raciale : héritage colonial
Pendant la période coloniale, les médecins, anthropologues et administrateurs belges ont construit une image du Noir comme naturellement instable, irrationnel, émotionnellement incontrôlable. Dans les colonies, la psychiatrie n’était pas conçue pour soigner, mais pour contrôler et neutraliser les corps noirs jugés dangereux pour l’ordre colonial. Les troubles mentaux étaient perçus comme des preuves de l’incapacité du Noir à se gouverner lui-même.
Cette logique s’est transposée dans l’État policier postcolonial. Aujourd’hui, lorsqu’un homme Noir présente des signes de fragilité psychologique ou des antécédents psychiatriques, cette pathologisation devient une justification de sa mort, comme si le diagnostic transformait la violence létale en acte « nécessaire » ou « compréhensible ».
Dans ce cadre, la psychiatrie n’est pas neutre. Elle renforce les stéréotypes coloniaux, produit une « dangerosité noire » présumée, et légitime la mise à mort légale ou quasi-légale de corps Noirs ou Arabes.
L’État policier : héritier des pratiques coloniales
Les forces de l’ordre en Belgique ne sont pas des institutions neutres ou protectrices. Elles sont les héritières directes des pratiques de contrôle et de violence coloniale. La police belge agit encore selon le principe : le corps Noir est suspect, instable, dangereux, pathologiquement prédisposé à la transgression.
Les exemples sont nombreux, les corps noirs meurent entre les mains de policiers ou dans des interventions médicalisées justifiées par la psychiatrisation. Dans chaque cas, le discours officiel insiste sur la folie supposée, la dangerosité, la nécessité de la force. Mais la réalité est simple : la mort du Noir est systématiquement légitimée par sa désignation comme irrationnel, dangereux, instable.
Dans le cas de Namur, le récit médiatique répète exactement cette logique : « suspect déséquilibré ». La formule est performative : elle transforme l’assassinat en acte compréhensible. Elle détourne le regard du racisme systémique et de la violence structurelle.
La psychiatrisation comme instrument de contrôle racial
La psychiatrisation raciale fonctionne sur trois niveaux :
Symbolique : elle construit le Noir comme intrinsèquement dangereux, justifiant la surveillance, le contrôle et la répression.
Institutionnel : elle permet à l’État et à la police de neutraliser légalement, médicalement et politiquement les corps noirs.
Narratif : elle fournit une excuse médiatique et publique à la violence, transformant la victime en sujet pathologique coupable de sa mort.
Ce mécanisme a des racines profondes. Dans le Congo colonial, les troubles mentaux étaient pathologisés pour masquer la brutalité de l’exploitation. Les révoltes, la résistance, ou les réactions naturelles à la violence coloniale étaient interprétées comme de la folie « noire ». Cette logique est reproduite aujourd’hui : les comportements qui sortent de l’ordinaire dans le cadre policier sont interprétés comme des preuves de dangerosité, de folie, et donc de sacrifiabilité.
Le continuum colonial en action : Namur
Reprenons les faits : un homme noir, trentenaire, avec un antécédent psychiatrique, est tué par la police. Les médias insistent sur sa dangerosité et son déséquilibre. La psychiatrisation devient la justification implicite de l’assassinat.
Ce scénario illustre une mécanique connue :
Le corps noir est toujours suspect ;
La psychiatrisation rend sa mort acceptable ;
La police est légitimée par l’État et le discours public ;
L’impunité structurelle garantit la répétition du schéma.
L’histoire coloniale se poursuit dans les rues de Namur. Le Noir est pathologisé pour sa mort. La police devient le bras armé de cette logique. Et la société légitime silencieusement ce meurtre en répétant le mot « fou ».
Antiracisme politique : le nommer et résister
Il n’y a pas de place pour l’indifférence. Nommer la police comme institution raciste et létale, dénoncer la psychiatrisation raciale, soutenir les familles, refuser la narration officielle, c’est politique. C’est radical. C’est décolonial.
Tant que l’État belge continuera à traiter les Noirs comme des corps pathologiques, des menaces et des sacrifiables, tant que la psychiatrisation servira à justifier la mort, l’impunité se perpétuera et la violence se normalisera.
Chaque nom compte… et maintenant cet homme de Namur. Chaque vie tuée doit être reconnue comme un crime d’État et non un incident isolé.
Noir + Fou = Sacrifiable
À Namur, la police n’a pas seulement tué un homme.
Elle a rappelé que, dans cet État postcolonial, être Noir et vulnérable suffit pour être sacrifiable.
Elle a rappelé que la psychiatrisation raciale est l’outil contemporain de la domination coloniale.
Elle a rappelé que la justice ne viendra pas de l’État, mais de notre vigilance, de notre lutte et de notre solidarité.
Tant que nous tairons ce mécanisme, tant que nous accepterons la justification de la mort par « folie » supposée, la Belgique continuera à tuer légalement ses citoyens Noirs et Arabes.
Nordine Saidi / Bruxelles Panthères

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