je suis dans un musée
des masques africains sur les murs
quelques objets fétiches que je connais, de proches
chaque objet a une petite plaquette nominative
avec une année du passé
les vitrines sont faites de verre très fin, fragile
un pare-brise presque intangible
je marche le long de ce couloir bien éclairé
une fille que j’ai connue dans un passé révolutionnaire approche
elle a la jupe que je reconnais, le T-shirt que je reconnais, les bottes que je reconnais
ses longs cheveux lisses font d’elle une sylvidre
elle sourit entre ses cheveux
elle passe à côté de moi, effleurant mes cheveux
un noeud s’emmêle entre deux mèches
nous sommes attachées quelques secondes seulement
aucune de nous deux ne fait le geste libérateur
les fils se dénouent d’eux-même
je continue sans me retourner
je m’assieds sur un strapontin
je commence à compter mes cheveux et grignoter les pointes abîmées
comme je fais quand je suis stressée, pensive
c’est le doudou le plus ancien que je me connais
je guette la fourche
et je remarque que quelques cheveux ne sont pas à moi