TOC Toc.

« On se plaît, on se prend. S’ennuie-t-on l’un avec l’autre ? on se quitte avec tout aussi peu de cérémonie que l’on s’est pris. Revient-on à se plaire ? On se reprend avec autant de vivacité que si c’était la première fois qu’on s’engageât ensemble. Matthias Grünewald - The dead lovers.jpgOn se quitte encore, et jamais on ne se brouille. Il est vrai que l’amour n’est entré pour rien dans tout cela ; mais l’amour, qu’était-il, qu’un désir que l’on se plaisait à s’exagérer, un mouvement des sens, dont il avait plu à la vanité des hommes de faire une vertu ? On sait aujourd’hui que le goût seul existe ; et si l’on se dit encore qu’on s’aime, c’est bien moins parce qu’on le croit, que parce que c’est une façon plus polie de se demander réciproquement ce dont on sent qu’on a besoin. Comme on s’est pris sans s’aimer, on se sépare sans se haïr, et l’on retire du moins, du faible goût que l’on s’est mutuellement inspiré, l’avantage d’être toujours prêts à s’obliger. »

Crébillon fils, La nuit et le moment.