Définition : ordalie et conduites ordaliques
“[…] Alors que l’ordalie était autrefois un rite judiciaire qui faisait appel au jugement de Dieu ou d’une force sacrée pour trancher de l’innocence d’une personne, l’ordalie aujourd’hui devient un rite lors duquel un ritualisant demande à la mort par l’intermédiaire de la prise de risque si son existence a encore un prix.” (« Approches symboliques de la mort et ritualités » p. 87, dans « Rites de passage: d’ailleurs, ici, pour ailleurs », Eres – Denis JEFFREY, 1994)
Historiquement, l’ordalie s’exerce de l’Antiquité au moyen-âge. La destinée des hommes dépend de(s) dieu(x). L’ordalie ou Jugement de Dieu déclarait innocent ou coupable, la personne soupçonnée de sorcellerie ou de crime en fonction du résultat de l’épreuve à laquelle la personne ne pouvait se soustraire. Dans l’ordalie, c’est le pouvoir souverain qui fait appel au Jugement de Dieu. Dans la conduite ordalique, c’est la personne qui a la maîtrise de son destin.
L’ordalie traditionnelle permettait de juger, de mettre à mort ou de renforcer la personne puisque injustement incriminée. En revanche, l’ordalie contemporaine n’est pas un rite social mais un rite individuel : la personne se donne la preuve de sa propre existence. Il s’agit d’une recherche de limites garantes de l’existence, d’un besoin de se prouver quelque chose à soi-même, sous les yeux des autres. C’est une quête. Il s’agit d’affronter la mort symboliquement. Mais, l’ordalie peut également se traduire aujourd’hui par une soumission au hasard qui rapproche la personne de la limite extrême.
Dans l’ordalie, la mort n’est cependant pas un objectif : il s’agit de jouer avec le risque et non de se donner la mort, en repoussant les limites. La personne sollicite son corps au maximum, ignorant toutes sensations de fatigue et de douleur, afin de prouver son existence et d’affirmer son identité, dans un but de dépassement de soi et de ses limites.
M. VALLEUR et A. CHARLES-NICOLAS regroupent sous le concept de « conduites ordaliques » les vécus de défi et de risque mortel, notamment à l’adolescence. Il s’agit pour l’adolescent de se sentir vivant, par le biais d’une apparente recherche de la mort. (Conduites Ordaliques, In Adolescents et conduites à risque, Editions ASH. Chapitre III, p.86, Patrick DESSEZ)